Présentation
 

Dans beaucoup de pays, et depuis plusieurs décennies, l’évaluation fait partie intégrante de la mise en œuvre de tout projet d’éducation, de formation et de recherche scientifique.  Elle a pour principal objet de comparer les résultats obtenus durant l’exécution des projets, avec ceux attendus, et cela en vue d’apporter toutes les améliorations nécessaires. L’évaluation vise, avant tout, l’amélioration de l’efficience du processus éducatif et, dans le cas de la recherche, l’accroissement de la qualité de celle-ci, puis la valorisation de ses résultats. Audelà donc des résultats scolaires des élèves, l’évaluation concerne les performances des établissements scolaires, la gouvernance, le travail et la réussite des enseignants et des formateurs, ainsi que le degré d’implication des parties prenantes au système d’éducation, de formation et de recherche scientifique.

L’évaluation est progressivement devenue un instrument important au service des stratégies et politiques publiques dans le domaine de l’éducation et de la formation. Elle concerne tous les niveaux d’enseignement : primaire, secondaire, professionnel et supérieur. Elle est, selon l’expression anglaise, built-in, c’est-à-dire située au cœur de la construction de tout programme ou projet. Cela devient même, dans certains contextes, un trait culturel. Les sociétés anglo-saxonnes, par exemple, y sont plus que favorables, alors que les sociétés de culture latine s’en sont longtemps méfiées, avant de se rendre à l’évidence qu’il s’agit d’un mécanisme d’amélioration du rendement interne et externe, et un instrument qui identifie, de manière constructive et  crédible, les faiblesses et les forces du système d’éducation et de formation.

Dans ce contexte, et en ce début du 21ème siècle, il est utile d’examiner le rôle de l’évaluation dans des pays émergents où les systèmes éducatifs font face aux enjeux des réformes successives et aux défis de la généralisation de l’éducation, de l’équité et de la qualité des apprentissages.

L’évaluation possède ses méthodes et ses instruments de mesure qui apprécient de façon qualitative et/ou quantitative les résultats obtenus par tel ou tel programme ou projet (outcome). Par ailleurs, l’évaluation applique, au système éducatif et aux universités, son cadre logique et ses référentiels. Elle pourrait mettre en évidence les ressources mobilisées (input) par la politique publique, ainsi que le rendement mesurable interne et externe (output) à travers les acquis des élèves, la performance de la gouvernance et la production scientifique. C’est ainsi que l’évaluation est étroitement imbriquée aux étapes du processus qui va des objectifs, fixés par les réformes, aux résultats à atteindre.

L’exercice d’évaluation, suscite souvent des réticences et résistances (parfois des rejets) de la part des acteurs concernés. Il n’est pas non plus exempt de critiques concernant ses fondements théoriques et ses méthodes. Certains considèrent que « trop d’évaluation tue l’évaluation ». Pourtant, et sans tomber dans l’excès, la performance des politiques éducatives, le succès ou l’échec scolaire, l’efficience des réformes, la comparaison d’indicateurs mondiaux, ont largement investi la débat public. Toutes les sociétés, en effet, interpellent leurs systèmes éducatifs pour qu’ils améliorent leur efficience. La réponse se trouve, en partie, dans des évaluations rigoureuses, transparentes et conduites de façon scientifique, régulière et pérenne.

En outre, la demande croissante d’analyses comparatives pour éclairer les choix en matière d’éducation et la compétition grandissante entre les établissements expliquent le développement des processus d'assurance qualité. C’est ainsi que dans plusieurs pays, des agences d’évaluation et d’accréditation indépendantes, ont été créées pour accorder des labels de qualité aux institutions éducatives et aux universités. Ce constat interpelle les pouvoirs publics des pays en développement où ces institutions d’évaluation sont émergeantes.

Dans le but de se doter de moyens de réflexion appropriés pour mener à bien sa mission d’évaluation, l’Instance Nationale d’Evaluation auprès du Conseil Supérieur de l’Education, de la Formation et de la Recherche Scientifique organise un Colloque international sur "L’Evaluation en Education et Formation : Approches, enjeux et défis.

Les travaux du colloque visent à apporter des éléments de réponses à des questions organisées en quatre axes :

  1. Cadres théoriques et approches de l’évaluation et de l’accréditation :
    L’évaluation utilise des approches et des méthodologies empruntées à d’autres champs des savoirs (analyse statistique, enquêtes, analyse comparative, analyse expérimentale, focus group, entretiens individuels...). Quels sont donc les concepts sur lesquels se basent les évaluations actuelles des systèmes éducatifs ? Quelle en est l’évolution récente, grâce à la sociologie de l’éducation et à la multidisciplinarité ? Quels sont les instruments et les outils utilisés dans les évaluations (auto-évaluation, évaluation interne et évaluation externe) ? 
  2. Le cadre institutionnel de l’évaluation dans une perspective comparative :
    L’évaluation s’inscrit dans un cadre institutionnel. Quelles sont les types d’institutions d’évaluation et d’accréditation dans les pays anglo-saxons et dans les pays européens ? Quelles réflexions et quels résultats pragmatiques peut-on tirer de cette comparaison ?  Quels sont les pratiques institutionnelles dans les pays émergents ?
  3. Evaluation des acquis des élèves et des processus d’apprentissage :
    Les enquêtes internationales TIMSS (Trends in International Mathematics and Science Study), PIRLS (Progress in International Reading Literacy Study) et PISA (Program for International Student Assessment) sont régulièrement réalisées dans de nombreux pays. Plusieurs pays, dont le Maroc, ont mis au point des politiques d’évaluation au niveau national. Que révèlent ces enquêtes sur les systèmes éducatifs ? Quelle place occupent les pays émergents dans les résultats de ces enquêtes ?
  4. Résultats des évaluations et politiques publiques.
    Si l’évaluation est un mécanisme d’amélioration de l’efficience et de la qualité, ainsi que de la performance des systèmes éducatifs, programmes et projets d’éducation, peut-on vérifier s’il existe un lien entre les résultats des évaluations réalisées et les réformes engagées dans ces systèmes et programmes ? Les résultats des évaluations ont-ils pu dans différents contextes politiques, influer sur les réformes mises en œuvre ?  

Etant donné que le système d’éducation et de formation au Maroc est engagé dans la mise en œuvre de la Vision stratégique de la réforme 2015-2030, ce colloque constitue une occasion pour les chercheurs et les experts, nationaux et internationaux, de débattre des enjeux de l’évaluation, ses forces, ses limites et son rôle dans l’accompagnement des réformes. Il permet également de partager les expériences issues de différents contextes des pays industrialisés (OCDE) et émergents. Cela conduira les participants à engager une réflexion comparative sur la mise en œuvre concrète des processus d’évaluation ainsi que sur l’utilisation optimale de leurs résultats, particulièrement en matière de régulation des politiques éducatives.